Plus d’un français sur deux se considère « timide » ou déclare l’avoir été dans le passé. La « timidité-maladie » affecterait une personne sur vingt et la « timidité-paralysante » une sur quarante. Emotion normale vécue par tous, la timidité diminue généralement avec l’âge et les expériences de la vie. Néanmoins, si elle s’installe et devient un handicap dans la vie sociale, professionnelle et affective, une souffrance, voire une phobie sociale, recourir à des pratiques ou des thérapies comportementales peut s’avérer salutaire.
De quoi s’agit-il ?
La timidité est une introversion, une inhibition comportementale au contact de personnes ou de situations nouvelles, non familières ou « intimidantes ».
On parle de timidité maladive lorsqu’elle se caractérise par une angoisse au quotidien et de timidité paralysante lorsqu’elle prend la forme d’une phobie sociale.
L’intimidation est une émotion combinant la crainte de l’autre et l’envie de lui plaire. Se sentant menacé par le regard de l’autre et démuni face à lui, surestimant la performance exigée par la situation et sous-estimant son aptitude à y faire face, le sujet timide se met inconsciemment beaucoup de pression. Enclenchant un cercle vicieux de la timidité (anxiété sociale/inhibition ou fuite/ »performance »décevante/dégradation de l’estime de soi), il en souffre énormément.
Pour Freud, la timidité s’apparente à la peur de l’abandon. Ayant vécu dans l’enfance le traumatisme de l’abandon, la personne timide pense ne pas être digne d’être aimée. La crainte de ne pas être à la hauteur lui fait redouter d’être rejetée de nouveau.
Comment se traduit elle ?
La timidité liée à des appréhensions négatives (peur d’abandon, de l’échec, de se dévoiler, de s’affirmer ou d’être observé) se traduit par :
- des troubles physiques : palpitations, rougeurs, sueurs, tremblements, rougissements, souffle court et bouche sèche, vertiges ;
- des troubles nerveux : sentiment de panique, inhibition comportementale (perte de ses moyens, blocage psychique, sentiment de profonde impuissance) ;
- un comportement de fuite en vue d’échapper aux situations intimidantes ;
- une forte réserve, une gène, un repli sur soi suite à la mise en place de stratégies d’évitement;
- une forte critique envers elle-même, une ultra-sensibilité à l’évaluation et au jugement d’autrui;
- une perte de la confiance en soi et une faible estime de soi;
- une souffrance morale liée à une solitude insupportable, au sentiment d’impuissance, car le sujet timide souhaite créer du lien et n’y arrive pas ;
- une anxiété sociale (fort sentiment d’insécurité) voire une phobie sociale.
Quelles en sont les conséquences ?
De façon générale, le sujet timide :
- subit des échecs dans les domaines amoureux, social et professionnel ;
- a des difficultés à communiquer, à faire valoir ses droits, ses convictions et ses opinions ;
- a des contacts difficiles avec sa hiérarchie, est moins ambitieux, sous-employé et connaît un développement de carrière plus limité.
Quelles sont les causes de la timidité ?
Elles seraient de différents ordres :
- 15 % à 20 % des enfants naitraient avec des prédispositions à la timidté: l’amygdale cérébrale (système d’alerte impliqué dans l’évaluation des stimuli sensoriels, l’apprentissage associatif et les réponses à apporter à la peur et l’anxiété) serait en sur-activation permanente ;
- L’environnement familial lors de l’enfance exercerait une influence importante sur le développement de la timidité:
- Les parents timides transmettraient leurs angoisses et leurs schémas comportementaux à leur enfant ;
- Les parents trop protecteurs seraient responsables du manque d’autonomie et d’aisance en société de leur enfant ;
- Les parents trop autoritaires en rabaissant leur enfant ou les parents trop permissifs en donnant l’impression d’être transparents pousseraient l’enfant à se replier sur lui-même, l’empêchant de faire valoir ses désirs et de s’affirmer, le rendant incapable de gérer une relation.
- Des traumatismes, des expériences douloureuses et intimidantes (échecs, remarques désobligeantes, relations toxiques,…) seraient à l’origine d’un manque de confiance en soi et d’une basse estime de soi ;
- le manque d’expérience sociale serait lié à une surprotection parentale ou à une introversion comportementale ;
- le contexte culturel particulier: au Japon , 90 % des gens s’estimeraient timides grandissant avec une culture qui les obligerait à être les meilleurs tout en restant humbles et discrets.
Quelles sont les qualités des personnes timides ?
Les personnes timides sont des hypersensibles dotés de nombreuses qualités:
- une grande capacité d’écoute,
- un grand sens de l’observation,
- une grande sensibilité et des prédispositions pour les disciplines artistiques,
- une personnalité réfléchie, pacificatrice ou modératrice, agissant avec tact, discrétion, modestie, respect, empathie, sérieux, conscience et engagement…
Comment dépasser sa timidité ?
Tout d’abord, il s’agit d’en prendre conscience, d’analyser ses peurs, de se raisonner, de relativiser et de relancer l’estime de soi:
- Accepter et assumer sa timidité, « ne plus en avoir peur » :
- Identifier les situations intimidantes : prendre conscience des idées et des appréhensions négatives et des perceptions erronées,
- Analyser ses échecs et relativiser, dépasser ses complexes et ses défauts.
- Se faire confiance, accroitre l’estime de soi-même, pour être en phase avec soi-même, être plus à l’aise et ne pas se sentir inférieur à autrui,
- Accepter les compliments pour favoriser l’affirmation de soi,
- S’affranchir du regard de l’autre : ne plus autoriser l’autre à manipuler, à décider pour soi,
- Anticiper et se préparer de façon adéquate, apprendre à mettre en place de nouveaux comportements adaptés à ces situations,
- Se fixer des objectifs et se donner les moyens de les atteindre.
Le passage graduel à l’action va permettre de maîtriser ses émotions et de modifier ses pensées négatives.
Il existe différents moyens d’enclencher ce cercle vertueux du renforcement de la confiance en soi :
- S’engager dans une activité de groupe (sport collectif),
- S’intéresser aux autres (bénévolat),
- Apprendre à respirer et à se relaxer (yoga),
- S’exercer à positiver et à relativiser (méditation),
- Faire l’apprentissage de l’expression publique, du jeu (théâtre),
- Affronter de façon graduelle les situations intimidantes (un peu plus à chaque fois) : ne plus fuir les responsabilités, les discours en public, les prises d’initiatives, les rencontres, les situations nouvelles,
- Développer tout ce qui était interdit par manque de confiance en soi: le culot, la curiosité, la créativité, le courage, le goût de l’aventure.
Les petites maladresses liées à l’inexpérience seront vite compensées par des peurs vaincues et des réussites qui stimuleront cette démarche positive d’affirmation de soi.
Pour les personnes les plus en difficulté, consulter un thérapeute et engager une thérapie comportementale individuelle ou de groupe peuvent-être clé pour mieux maîtriser ses émotions, raisonner ses peurs, modifier ses pensées et regagner de la confiance en soi.
L’enjeu de se jouer de sa timidité est bien de s’épanouir et de valoriser des qualités intellectuelles et émotionnelles (sensibilité, empathie, créativité, modération,…) de plus en plus recherchées par les entreprises et la société.