NE PAS ÊTRE SORTI DE L’AUBERGE

L’expression « ne pas être sorti de l’auberge » est une locution-phrase remontant au XIXè siècle qui évoque le fait de ne pas en avoir terminé avec une situation éprouvante ou les ennuis de façon plus large.

La définition :

  • ne pas en avoir fini avec les difficultés ou les ennuis,
  • ne pas être tiré d’affaires,
  • ne pas être hors d’ennui.

La signification :

Lors d’une conversation, se dit lorsqu’on se trouve confronté à une situation embarrassante, désagréable, pénible et qu’il nous semble compliqué, voire impossible, d’en voir le bout. Cette situation étant loin d’être terminée, elle reflète également l’état de détresse et d’inconfort de celui qui la vit.


Origines :

De prime abord, il semble difficile d’associer les ennuis avec une auberge, plutôt destinée à être accueillante.
Une première interprétation est relative à l’affaire criminelle de l’Auberge rouge survenue au début du XIXe siècle. Le couple propriétaire de l’auberge de Peyrebeille en Ardèche fut accusé de sordides histoires de meurtres et viols.


En 1831, un riche cultivateur fut découvert mort sur les bords de l’Allier après avoir passé la soirée dans cette auberge. Le couple, soudainement enrichi, fut accusé et un mendiant dit avoir été témoin de l’assassinat. Un procès s’ouvrit et une centaine de témoins affirmèrent avoir vu ou entendu parler de repas préparés à base de restes humains, de mains flottants dans des marmites, de draps ensanglantés… Le couple et leur domestique furent suspectés d’une cinquantaine de meurtres non élucidés dans la région. Condamnés à la peine de mort, ils furent guillotinés dans la cour de leur auberge devant 3 000 personnes.
Cette affaire, entre le fait divers et la légende, a inspiré de nombreux auteurs.

La deuxième interprétation s’appuie sur la signification du mot « auberge » en argot des prisonniers, ce mot désignant ironiquement la prison. Dans les comptes-rendus du procès de La compagnie des Coquillards (association de malfaiteurs), l’expression « auberge de midi » est associée à la prison. Dans le lexique argotique des voleurs, l’auberge désignait la prison, le cachot. En effet, les prisons fournissaient le gîte et le couvert pour leurs détenus sans leur laisser la liberté d’en sortir selon leur bon vouloir. Une fois enfermés, ils n’étaient pas sortis de l’auberge… L’expression argotique est par la suite passée dans le langage courant.

Les exemples :

  • « Je ne savais déjà pas très bien sur quel pied je dansais, dans cette affaire, mais si, par-dessus le marché, tout le monde fuyait comme ça devant moi, je n’étais pas sorti de l’auberge. » – Léo Malet, Les rats de Montsouris, 1955
  • « Il ne pensait pas qu’elle se soit aventurée si loin, mais s’il devait sillonner l’île, il n’était pas sorti de l’auberge ! Il explora chaque bâtiment de l’hôtel. » – Jaci Burton, La chambre des délices, 2014
  • « On avait maintenant en plus de l’équipe du Frisé, le commissaire Mandru et sa brigade au train. Je nous voyais pas sortis de l’auberge ! » – A. Simonin, Le Petit Simonin illustré par l’exemple, Paris, 1968 –
  • « J’ai bien compris votre allusion, lieutenant, mais qu’est-ce que ça change ? – Ça change, ça change que… ça change que si le Klan local est vraiment dans le coup et bien nous ne sommes pas sortis de l’auberge ! » – John Toland, No man’s land, 1980

Citation sur la cuisine :

« La bonne cuisine, c’est le souvenir. »

George Simenon